L’année 2022 a été marquée par de nombreux chamboulements sur le marché de l’énergie, entre conflits politiques en Europe, incertitudes autour du covid et difficultés de production d’énergie par EDF. Ces aléas ont causé une hausse historique du prix de l’électricité et du gaz naturel.
Évolution des prix de l’électricité en 2022
Un premier semestre 2022 record !
L’année 2022 sur le prix de l’électricité a été historique, dans la continuité des hausses perçues sur la deuxième moitié de 2021. En effet, dès la fin de l’été 2021, des inspections et travaux de maintenance ont mis en évidence des problèmes de corrosion sur plusieurs réacteurs nucléaires français. Au total, 16 réacteurs sont concernés par ce défaut, les plus récents du parc nucléaire en service.
Ces problèmes de corrosion, associés à un calendrier de maintenance perturbé depuis la crise du covid, ont provoqué une réduction importante de la production électrique à partir du nucléaire. Ces difficultés, couplées à l’annonce de la guerre en Ukraine, ont provoqué une hausse progressive de la tension sur le marché sur la première moitié de l’année. Entre le 1er janvier 2022 et le 1 juillet 2022, le prix pour 2023 est passé de 127,8€/MWh à près de 364,29€/MWh, soit une hausse de 185%.
Cette tension s’est ensuite accentuée lors de la période estivale, pour atteindre des niveaux historiques, à 1130€/MWh. Cette hausse a été lié à :
- la production nucléaire limitée ;
- la réduction progressive des volumes de gaz russe livrés en Europe ;
- les incertitudes et une forte spéculation des acteurs du marché sur les préparatifs de l’hiver 2022-2023 ;
- la sécheresse importante en France en août, limitant la production électrique hydraulique ;
- la hausse de la consommation électrique pour climatiser les locaux et logements.
Début d’une phase d’accalmie au second semestre
A partir de septembre, le prix de l’électricité est entré dans une phase d’accalmie progressive, due à la fin de la sécheresse, des volumes de GNL livrés importants ou encore une activité économique chinoise limitée à cause du covid. De plus, l’atteinte, fin octobre, des niveaux maximales de stockage du gaz en France et en Europe ont permis de rassurer les marchés.
Au final, le prix de l’électricité pour 2023 s’élève autour des 280€/MWh fin décembre, grâce à une production EnR importante. Ce niveau de prix représente malgré tout une hausse de 120% sur l’année.
Sur les années de livraison à plus long terme (2024 et 2025), le prix de l’électricité est plus réduit, du fait d’une marge de manœuvre plus importante de la part des acteurs de l’énergie. Néanmoins, le prix 2024 a connu une hausse importante de 196% sur l’année, pour s’établir autour des 260€/MWh. Pour 2025, le prix de l’électricité s’établit autour des 175€/MWh (+102% sur l’année).
Quels sont les prix de l’électricité en 2023 ?
Le prix de l’électricité devrait s’inscrire dans la continuité de cette fin 2022, avec une légère réduction des prix de l’électricité. Néanmoins, cette réduction probable est incertaine et fragile, car la tension de fond sur la production électrique française et européenne peut provoquer des variations à la fois soudaines et importantes.
En effet, de nombreux réacteurs nucléaires français vont devoir effectuer leur maintenance, décalée à de nombreuses reprises, et les problèmes de corrosion vont empêcher une production importante d’énergie par les réacteurs nucléaires. EDF annonce d’ailleurs une projection de production électrique nucléaire à hauteur de 300-330 TWh, soit une production sensiblement identique par rapport à 2022.
Une stabilisation des prix de l’électricité entre mars et juin 2023 autour de 180€/MWh
Entre mars et juin 2023, les prix de l’électricité sont rentrés dans une phase appelée contango. Cela signifie que les prix spot sont plus avantageux que des souscrits à long terme. Au 2 juin 2023, le prix de l’électricité pour l’année de livraison 2024 s’élève à 152,71€/MWh. Dans le même temps, le prix spot de l’électricité s’établit à 52,01€/MWh, soit une différence tarifaire de 193%. Cela s’explique par des niveaux de production importants de la part des énergies renouvelables (éolien, solaire) qui offrent une meilleure couverture de la demande. Dans le même temps, les températures plus chaudes limitent la demande d’électricité.
On peut constater sur le graphique ci-dessus une oscillation importante des prix sur l’année de livraison 2023, qui illustre les difficultés du secteur à avoir des certitudes à moyen terme. En effet, pour l’hiver prochain, des doutes subsistes sur la capacité de l’Europe à répondre à la demande avec comme unique ressource ses stocks et les livraisons de GNL. De plus, les difficultés autour des centrales nucléaires ajoutent de l’incertitude sur le niveau de production à moyen terme. Entre le 1er janvier 2023 et le 23 mai 2023, le prix de l’électricité pour cette année de livraison a tout de même diminué de 26,76%, signe d’une légère accalmie sur la sécurité d’approvisionnement électrique en France.
Les prix pour les années de livraison 2025 et 2026 sont plus stables, et oscillent sur le mois de mai 2023 autour de 130€/MWh pour 2025, et 110€/MWh pour 2026.
Un été 2023 apaisé pour l’électricité
Depuis le 20 juin 2023, le prix de l’électricité connaît une tendance légèrement baissière, correspondant en grande partie à la baisse de la demande énergétique durant la période estivale. En effet, le prix pour l’année 2023 a diminué de 33%, pour passer de 205€ à 135,62€. La situation de contango sur le prix de l’électricité en 2023 suit cette tendance, avec un prix spot qui se situe à 80,35€.
Courant juillet, une tendance baissière de fond, avec la baisse de la demande, a été contrebalancé par une baisse de la production éolienne. Ceci a généré une stabilisation des prix. En effet, durant la semaine 31, l’éolien a contribué jusqu’à 28% de la production électrique. Or, par la suite, entre la semaine 32 et 34, la contribution de la production éolienne dans le mix énergétique a chuté pour atteindre en moyenne entre 8 et 10%.
Pour l’année de livraison 2024 et 2025, le prix de l’électricité s’établie respectivement à 121,86€/MWh et 108,38€/MWh. Cette situation de backwardation entre les différentes années de livraison illustre une attente dans les résultats des actions menées par l’Europe pour assurer l’autonomie énergétique du continent (sobriété énergétique, diversification des fournisseurs de GNL…).
Hausse de 77% des autoconsommateurs d’électricité en 1 an
Au 30 juin 2023, 325 939 autoconsommateurs d’électricité individuels sont recensés en France, soit une hausse de 77% des autoconsommateurs par rapport à la même période en 2022. Cette hausse des installations photovoltaïques s’explique par la hausse des tarifs de l’électricité depuis la fin 2021. Au total, 4 départements dépassent dorénavant les 50 MW de puissance installée pour de l’autoconsommation : La Haute-Garonne, l’Hérault, les Bouches-du-Rhône et l’Isère. En plus de ces 4 départements, d’autres départements se distinguent également, avec des puissances installées entre 36 et 47 MW : le Nord, la Loire-Atlantique et le Rhône. Au total, la puissance du parc solaire atteint à la fin du premier semestre 2023 18 GW. Malgré cette embellie, cette puissance installée reste en-deça par rapport aux objectifs à atteindre d’ici 2050. Pour rappel, la France doit compter entre 92 et 144 GW de puissance solaire sur son territoire.
Une augmentation du prix de l’électricité début 2024 à venir ?
Le prix du TRV pourrait connaître une nouvelle hausse en février 2024, si la décision gouvernementale suit les suggestions de la CRE. Cette commission propose une augmentation de 10 à 20% du prix de l’électricité. De son côté, Bruno le Maire, ministre de l’économie, n’est pas en faveur d’une telle augmentation tarifaire. Il a d’ailleurs déclaré, avec Agnès Pannier-Runacher, que cette augmentation ne dépasserait pas 10%.
Évolution des prix du gaz en 2022
Un premier semestre de forte tension sur l’approvisionnement
A l’image de l’électricité, le cours du gaz a connu une année mouvementée, sous le prisme du conflit en Ukraine. En effet, les différentes sanctions prises par l’Europe au sujet de la Russie ont entraîné une baisse progressive des volumes de gaz russe livrés en Europe. Or, à l’origine, le gaz russe représentait près de 45% des volumes de gaz importés en Europe, soit environ 155 milliards de m3.
Au cours du premier semestre 2022, une phase de stabilisation s’est mise en place, dans l’attente de l’entrée en vigueur des premières sanctions européennes. Puis, début juillet, la Russie a entamé une procédure de réduction progressive des volumes de gaz livrés, en réaction aux différentes embargos et sanctions.
Cette décision de la Russie a provoqué une panique sur les marchés. Le prix du gaz pour l’année de livraison 2023 a atteint un niveau record, à 297,75€. En conséquence, les politiques européens ont dû trouver des solutions pour compenser ces volumes manquants. La solution retenue a été d’acheter en quantité du GNL auprès des Etats-Unis, du Qatar, de l’Egypte ou encore de l’Afrique de l’Ouest. Au total, plus de 50 milliards de m3 de GNL ont été importés.
Une accalmie en fin d’année, suite au succès du stockage gazier
Couplé au plan de sobriété énergétique, ces livraisons de GNL ont permis d’atteindre la capacité maximale de stockage de gaz début Novembre, et être ainsi en capacité de répondre aux besoins énergétiques durant l’hiver 2022-2023. Cette réussite a permis aux prix du marché de connaître une réduction progressive, grâce à un contexte favorable :
- Les températures au début de l’hiver étaient douces ;
- La demande énergétique a été plus faible que prévu (-8% sur l’électricité par rapport à 2020, -12% pour le gaz par rapport à 2018) ;
- La situation sanitaire en Chine limite l’activité économique.
Au final, entre septembre et décembre, le prix du gaz naturel pour 2023 a diminué de 57%, pour s’établir à 79,06€/MWh. Concernant 2024 et 2025, le prix a respectivement diminué de 36% (à 75,52€/ MWh), et de 26,5% (à 58,8€/MWh).
Quels sont les prix du gaz naturel en 2023 ?
Entre mars et juin 2023, une stabilisation des prix du gaz naturel autour des 50 euros/MWh
Le prix du gaz naturel est de 41,519€/MWh pour l’année de livraison 2024 (39,302€/MWh pour 2025). Ce tarif correspond à une baisse de 22% en 1 mois. Cette baisse du prix du gaz s’explique par des températures chaudes qui limitent la demande, des livraisons en GNL suffisamment importantes pour approvisionner l’Europe et préparer les stockes pour l’hiver prochain. Les spécialistes évoquent un stockage à 100% des capacités à la fin août.
Une maintenance en Norvège en juin 2023 réduit les volumes de gaz disponibles
Durant le mois de juin, une maintenance sur les terminaux norvégiens a réduit les volumes de gaz naturel disponibles en Europe, occasionnant une augmentation de 23% pour 2024 au cours du mois. Néanmoins, le prix spot du gaz naturel est toujours inférieur au prix annuel, ce qui favorise le stockage. En effet, le niveau de stockage est aujourd’hui à 80% en Europe, et devrait atteindre les 100% d’ici Novembre. Pour 2025, le prix du gaz naturel est de 43,33€/MWh, soit une hausse de 11% sur le mois.
Au cours du mois de juillet 2023, le prix du gaz naturel a oscillé entre 48€ et 53€/MWh pour l’année 2024, et entre 41€ à 46€/MWh. Cette stabilisation démontre une période d’attente durant cette période estivale, et devrait prendre fin début septembre, avec la reprise d’activité. De plus, l’approche de l’hiver 2023-2024 devrait influencer les cours des prix du gaz naturel, selon la capacité de l’Europe à répondre à la demande énergétique.
Une stabilisation des prix du gaz naturel durant l’été 2023
Au cours de la période estivale, le prix du gaz naturel pour l’année de livraison 2023 s’est stabilisé à 46,5€/MWh au 28 août 2023. Cette stabilisation correspond à une demande réduite durant la période estivale, couplée à une bonne livraison de GNL en Europe. Pour l’année de livraison 2024, le prix du gaz naturel s’établie à 46,5€, soit un prix relativement stable depuis la mi-juin. Néanmoins, la légère hausse au cours du mois d’août s’explique par une grève prévue début septembre sur des sites de production de GNL en Australie. Cette grève s’accompagne d’une réduction des livraisons de gaz naturel en provenance de Norvège, suite à des travaux de maintenance sur un grand champ gazier. Les prochaines semaines devraient donc connaître une tendance haussière sur les prix du gaz naturel.