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Quota carbone : comprendre le concept, ses enjeux et son fonctionnement

Mis en place depuis 2005, le quota carbone est la pierre angulaire de la stratégie de l’Union européenne pour réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) de plusieurs secteurs d’activité. Ce mécanisme complexe fait intervenir des dimensions environnementales, économiques, financières, et des notions comme le marché carbone, le système de permis d’émissions négociables (ETS), les enchères et allocation gratuite, la tarification du carbone, la recette carbone…

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En 2024, l’Europe a émis environ 1,39 milliard1 de quotas carbone dans le cadre du système d’échange de quotas d’émission (SEQE-UE). Ces quotas ont ensuite été répartis entre les pays membres de l’Union.   

Quel est le fondement du quota carbone ? Quels sont ses enjeux et son fonctionnement ? Tout ce que vous devez savoir sur le mécanisme du quota carbone dans cet article ! 

Ce qu’il faut retenir :

  • Le quota carbone est entré en vigueur en 2005.
  • C’est un dispositif créé par l’Union européenne pour plafonner les émissions de CO2 des entreprises.
  • 1 quota carbone = 1 tonne de CO2-eq.
  • Le quota carbone fonctionne sur le principe du cap-and-trade. Il est régi par le système d’échange de quotas d’émissions de l’UE (SEQE-UE).

Qu’est-ce qu’un quota carbone ?

Le quota carbone est un titre émis par l’Union européenne qui autorise son détenteur à émettre une quantité limitée de CO2 ou d’un autre gaz ayant un effet de serre (GES). C’est en quelque sorte un « droit d’émettre ». L’ensemble des quotas carbone émis constitue un plafonnement des émissions de GES. 

Bon à savoir : 1 quota carbone = 1 tonne de CO2-eq

Les émissions des différents gaz à effet de serre sont exprimées en équivalent CO2. Comme tous les gaz n’ont pas le même pouvoir de réchauffement global (PRG), il a fallu les convertir en équivalent CO2 en utilisant leur PRG comme coefficient de pondération pour avoir une mesure universelle.

Les principaux GES sont les suivants :

DésignationFormule chimiquePRG à 100 ans
Dioxyde de carbone CO21
Méthane (non différencié)CH428
Protoxyde d’azoteN2O273
Hexafluorure de soufreSF624 300
Trifluorure d’azoteNF317 400
Gaz fluorésHFC, PFC, HFE, CFC, HCFCDe 10 à 16 200
Source : https://prod-basecarbonesolo.ademe-dri.fr/documentation/UPLOAD_DOC_FR/index.htm?prg.htm

En prenant l’exemple d’une entreprise qui émet 1 000 tonnes de méthane par an, la formule pour les convertir en CO2-eq est la suivante :

CO2-eq = (1000 x 28), soit 28 000 tonnes CO2-eq

Une entreprise qui émet 28 000 tonnes CO2-eq sur une année doit détenir 28 000 quotas carbone.   

Bon à savoir : En 2024, les émissions de GES en France s’élevaient à 404 millions de tonnes équivalent CO2 (Mt CO2-eq)2.

Levier essentiel de la stratégie européenne de réduction des émissions de GES sur le territoire, le quota carbone est aussi un outil performant pour accompagner la décarbonation des entreprises

Bon à savoir : La réforme du marché carbone adoptée en mai 20233 porte l’objectif de réduction des émissions de GES à -62 % à l’horizon 2030, contre -43 % initialement.

La conformité en matière de quotas carbone consiste à respecter des obligations réglementaires définies dans le système ETS (Emissions Trading System). Cela implique notamment la restitution d’un nombre de quotas carbone équivalent aux émissions vérifiées d’une entreprise concernée. Les entreprises doivent calculer leurs émissions de GES selon le découpage par scope 1, 2 et 3 établi par l’ADEME4, qui permet de catégoriser les différentes sources d’émissions de CO2. 

Dans le cadre du protocole de Kyoto, les États doivent aussi effectuer leur propre conformité au titre des engagements de l’Union européenne.

Bon à savoir : Pour établir leur conformité annuelle, les entreprises européennes ne peuvent utiliser que les quotas européens. 

Historique et mise en place au niveau international

La naissance du quota carbone intervient peu de temps après l’adoption du protocole de Kyoto en 1997 fixant des objectifs de réduction des émissions de GES juridiquement contraignants. Ces dispositions ont nécessité la mise en place d’outils politiques et financiers adaptés aux échanges de quotas d’émissions de CO2 au sein de l’UE. En accord avec les exigences environnementales du protocole de Kyoto5, il fallait inciter les décideurs économiques à investir dans les énergies propres et dans les technologies plus sobres. Les États ont donc décidé de valoriser économiquement l’émission d’une tonne de CO2. Le marché du carbone en Europe, avec la directive SEQE-UE, a été adopté en 2003, et mis en place en 2005. 

Bon à savoir : En 2022, le SEQE-UE couvrait en France plus de 1 000 installations émettant 84 millions de tonnes de CO2, soit environ 20 % des émissions territoriales hexagonales. Cette proportion plus faible que le reste de l’Europe s’explique par un mix électrique historiquement décarboné, grâce notamment au nucléaire.

La mise en œuvre du quota carbone et des places de marché a permis d’une part de contraindre les entreprises assujetties à réduire leurs émissions de GES et d’autre part de générer des recettes importantes pour financer la lutte contre le changement climatique. 

Bon à savoir : Les instruments de tarification du carbone ont généré au niveau mondial près de 100 milliards de dollars de revenus en 20216.

Comment fonctionne le quota carbone ?

Le quota carbone fonctionne sur le principe du cap-and-trade :

  1. La Commission européenne fixe annuellement un plafond global d’émissions de GES pour plusieurs secteurs d’activité. Ce plafond est ensuite converti en quotas carbone. 
  2. Chaque année, le plafond est inférieur à celui de l’année N-1 pour obliger les entreprises à réduire leurs émissions de CO2.  
  3. L’Europe distribue des quotas carbone à ses pays membres via des Plans nationaux d’allocation des quotas7 (PNAQ). 
  4. Chaque entreprise participant à ce mécanisme reçoit au début de la période de conformité un certain nombre de quotas ou crédits correspondant à ses émissions de référence. 
  5. À la fin de la période de conformité, l’entreprise doit détenir une quantité de quotas égale au niveau de ses émissions. Si elle en a moins que le volume de ses émissions, elle doit acheter les quotas manquants sur le marché. À l’inverse, elle peut les vendre si elle a un excédent de quotas carbone, ou les thésauriser pour la prochaine période. 

Le nombre de quotas délivrés dans l’Union européenne est revu à la baisse chaque année : 1,74 % entre 2013 et 2020, 2,2 % entre 2021 et 2023. Entre 2024 et 2027, il devrait réduire de 4,3 % par an, et à partir de 2028, de 4,4 %. 

Bon à savoir : Le SEQE-UE s’applique à certaines installations industrielles depuis 2005, aux compagnies aériennes depuis 2013, et aux compagnies maritimes depuis 2024.

Attribution et répartition des quotas

Le PNAQ définit à l’échelle nationale les quantités de quotas carbone allouées chaque année aux exploitants sur une période de conformité donnée. Il est décidé par le ministère de l’Écologie et du Développement durable, en concertation avec le ministère de l’Économie, des Finances et de l’Industrie, puis validé par la Commission européenne. Depuis 2008, les PNAQ sont établis pour 5 ans. 

Pour en bénéficier, les exploitants doivent impérativement être en possession d’une autorisation. C’est également les critères de l’autorisation qui vont servir de référence à l’établissement de la conformité.

Bon à savoir : En France, en 2024, environ 1 300 entreprises étaient attributaires de quotas carbone. 

Le PNAQ prend en compte trois types d’allocation :

  • Une allocation globale établie selon le potentiel de réduction des émissions de GES, les prévisions de sa croissance et une courbe de progrès,
  • Une allocation par secteur calculée à partir des émissions antérieures de GES, des prévisions concernant l’évolution de l’activité et les stratégies de réduction des GES,
  • Une allocation pour les installations définie en considérant la proportion d’émissions de GES pour chaque installation.

Systèmes d’échanges (marché du carbone, ETS…)

Le mécanisme de flexibilité réglementaire mis en œuvre pour réduire les émissions de GES repose sur un système de plafonnement des émissions et d’échange (cap-and-trade) géré par l’ETS. Celui-ci fixe le plafond global des émissions de GES et crée un marché carbone où l’offre limitée de quotas carbone définit une tarification selon les lois de l’offre et de la demande. 

Au niveau mondial, il existe trois types de marchés où est établi le prix du carbone  et où se tiennent les transactions : 

  • Le marché carbone primaire, où se déroulent les enchères de quotas émis par l’autorité publique.
  • Le marché carbone secondaire, qui concerne les échanges de quotas entre les acteurs. L’autorité publique n’y participe pas.
  • Le marché carbone baseline-and-credits. En cas de dépassement de leur plafond d’émissions, les entreprises doivent acheter des quotas (éventuellement à l’autorité publique). En dessous de leur plafond, elles gagnent des quotas qui sont échangeables sur le marché.

L’expression « transaction » couvre toutes les opérations de transfert, allocation, émission, conversion, retrait, annulation ou encore thésaurisation. 

En fait, deux instruments définissent le prix du carbone : la taxe carbone, qui fixe un prix par tonne de CO2, et le système d’échange de quotas d’émission (ETS) qui fixe une quantité maximale d’émissions de GES autorisée8.

Bon à savoir : En novembre 2025, le prix du quota carbone selon le système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne (SEQE-UE) était de 82,64 €.9

Suivi, contrôle et sanctions

Le système d’échange européen (SEQE-UE) est l’entité garante du bon fonctionnement de la stratégie des quotas carbone. Il enregistre l’ensemble des transactions entre les intervenants et assure leur tenue de compte. Ses principales fonctions consistent à :

  • Gérer l’allocation initiale des quotas carbone à chaque participant/intervenant,
  • Suivre les états de compte,
  • Gérer les comptes et les transferts,
  • Gérer les transactions,
  • Gérer les processus de conformité, 
  • Procéder au retrait et annulation des quotas carbone et des crédits,
  • Enregistrer les opérations de thésaurisation des quotas et crédits.

En cas de non-conformité, les exploitants encourent deux types de sanctions : 

  • Une sanction « en nature » où tout exploitant n’ayant pas restitué assez de quotas pour l’exercice considéré doit rendre un nombre de quotas suffisant l’année suivante, en plus de ses nouveaux engagements. 
  • Une sanction pécuniaire : une amende de 100 € par tonne depuis 200810 pour les exploitants n’ayant pas respecté leurs engagements (toute tonne émise doit avoir une contrepartie de quotas).

Les impacts du quota carbone sur les entreprises et la société

En monétisant les émissions de GES, le système du quota carbone oblige les entreprises éligibles à adopter une stratégie durable de réduction de leurs émissions de CO2. Si les règles de l’ETS offrent une souplesse aux acteurs concernés, la valorisation financière des émissions carbone pèse néanmoins sur la santé financière des entreprises les moins vertueuses. 

Concernant la société, les quotas carbone constituent également un levier essentiel de réduction des émissions de GES. Les recettes générées par ce mécanisme de marché et les enchères permettent de financer la lutte contre le dérèglement climatique et de subventionner des travaux au profit des citoyens, comme la rénovation de l’habitat. 

Bon à savoir : Depuis 2013, les lois de finance prévoient que les revenus des enchères de la France soient affectés à l’Agence nationale de l’habitat (ANAH), dans la limite d’un plafond se situant à 700 millions d’euros11 en 2023 et 2024.

A contrario, il ne faut pas négliger l’impact carbone sur le prix de l’électricité. En effet, les centrales thermiques fonctionnant à partir d’énergies fossiles (gaz naturel, charbon) répercutent souvent les coûts des quotas carbone sur le prix de vente de l’électricité, ce qui peut aussi influer sur le montant de la TICGN (taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel). C’est un facteur à prendre en compte dans votre stratégie d’optimisation des factures énergétiques.

Quel type d’entreprise est le plus impacté ?

Les secteurs émettant le plus de GES vont être directement impactés, comme : 

  • La sidérurgie,
  • La pétrochimie,
  • Le raffinage et plus globalement l’énergie,
  • La chimie,
  • La construction, avec les cimentiers, 
  • La production de verre.

Les entreprises de transport (l’aviation et plus récemment le transport maritime) sont également concernées.   

Enjeux et limites du système de quota carbone

Avantages et critiques

Le système ETS de quota carbone offre de nombreux avantages :

  • C’est un mécanisme financièrement contraignant, levier essentiel de décarbonation des activités et de lutte contre le changement climatique.   
  • C’est un système flexible, permettant aux différents acteurs d’acheter, vendre, thésauriser des quotas carbone.
  • C’est un moteur d’innovation et de développement d’énergies bas carbone.

Les problématiques qu’il peut soulever tiennent dans son caractère spéculatif et le risque de répercussion sur les prix payés par les consommateurs. 

Bon à savoir : Le mécanisme de quota carbone est complexe et nécessite une gestion rigoureuse pour profiter de ses avantages. Si votre entreprise est attributaire de quotas carbone, il est préférable de faire appel à une société de courtage en énergie pour garantir votre conformité.

Perspectives d’évolution et alternatives

Les quotas carbone offrent des perspectives intéressantes en matière de décarbonation des activités au niveau européen et mondial. Ce mécanisme a prouvé son efficacité. Entre 2010 et 2024, les émissions de GES des activités économiques françaises ont diminué de 25 %.

Le système de quotas gratuits a été révisé pour contrer le problème de fuite de carbone en se concentrant sur les secteurs soumis au risque de délocalisation de leur production en dehors de l’Union européenne. 

D’autre part, la mise en place progressive du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) s’accompagnera, d’ici 2034, d’une suppression graduelle de l’allocation gratuite de quotas dans le SEQE-UE pour les secteurs couverts par le MACF.

Questions fréquentes sur le quota carbone

Qui fixe le quota carbone ?

Le quota carbone est fixé par la Commission européenne. Elle détermine chaque année un plafond global d’émissions (cap) selon ses objectifs de réduction des émissions de GES.  

Qui est soumis au quota carbone ?

Le secteur industriel (sidérurgie, pétrochimie, raffinage, cimenterie), les énergéticiens, le transport (aviation, maritime) sont soumis au quota carbone.

Le quota carbone est-il efficace contre le changement climatique ?

Oui, le système des quotas carbone est efficace pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Il est à la fois incitatif et contraignant. 

Comment acheter ou vendre des quotas carbone ?

Il est possible de vendre et acheter des quotas carbone aux enchères organisées par la Commission européenne ou sur le marché secondaire entre entreprises (places boursières dédiées à l’énergie ou via des transactions de gré à gré).

Si votre entreprise est bénéficiaire de quotas carbone, il est essentiel de vous entourer d’un expert en énergie. Il vous accompagnera pour réduire durablement vos émissions de GES, optimiser votre consommation d’énergie et déployer sur votre site des alternatives décarbonées (centrale photovoltaïque). Votre courtier en énergie vous conseille sur la gestion de vos quotas carbone, sur la vente et l’achat de quotas sur le marché secondaire pour dégager des recettes, et aide à garantir votre conformité.    


  1.  https://climate.ec.europa.eu/eu-action/carbon-markets/eu-emissions-trading-system-eu-ets/eu-ets-emissions-cap_en?utm_source=chatgpt.com
    ↩︎
  2.  https://www.insee.fr/fr/statistiques/8654458#:~:text=Les%20émissions%20de%20gaz%20à%20effet%20de%20serre%20(GES)%20des,utilisation%20de%20leurs%20véhicules%20(figure
    ↩︎
  3.  https://www.ecologie.gouv.fr/politiques-publiques/marches-du-carbone-seqe-ue
    ↩︎
  4.  https://www.culture.gouv.fr/thematiques/transition-ecologique/Centre-de-ressources-Transition-ecologique-de-la-Culture/Outils-de-mesure-guides/Bilan-Carbone-et-calculateurs-carbone/le-bilan-carbone
    ↩︎
  5.  https://www.vie-publique.fr/fiches/274835-quest-ce-que-le-protocole-de-kyoto
    ↩︎
  6.  https://www.i4ce.org/wp-content/uploads/2022/09/220915-i4ce3632-ComptesMondiaux2022-VF-10p.pdf
    ↩︎
  7.  https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000046201582
    ↩︎
  8.  https://www.ecologie.gouv.fr/politiques-publiques/prix-du-carbone#les-marches-carbone-3

    ↩︎
  9.  https://fr.tradingeconomics.com/commodity/carbon
    ↩︎
  10.  https://politiques-sociales.caissedesdepots.fr/SERINGAS/glossaire
    ↩︎
  11.  https://www.ecologie.gouv.fr/politiques-publiques/marches-du-carbone-seqe-ue
    ↩︎